Dans les griffes du vampire : le 1er western sur le thème du surnaturel

curse_of_undead_poster_02Dans les griffes du vampire ( Curse of the Undead) - Film d'Edouard Dein, 1959.

Sous ce titre ultra classique de film d'horreur se cache une oeuvre assez originale, puisque mêlant deux genres à la base fort différents, le western et le film de vampires.
Il s'agirait même du premier film du genre à introduire un aspect surnaturel et horrifique dans une histoire classique de western.

Il sera suivi d'autres exemples aux titres plus au moins farfelus comme Billy le Kid contre Dracula en 1966 ou bien plus récemment Cowboys et vampires, en 2010.

La qualité de celui-ci réside la sobriété de son traitement.

Pas de chauve souris en carton, de canines sanguinolentes ni de blafardes fiancées revenues d'outre-tombe dans le film d'Edouard Dein. 
Reste juste la présence du vampire qui s'introduit pour mordre dans le cou ses victimes et les tuer proprement sans effusion de sang, puis qui va dormir dans la crypte familiale lorsque le jour se lève.
La sobriété du film s'accompagne d'une réalisation soignée et d'un joli noir et blanc, accompagnant au mieux les scènes nocturnes, là aussi sans recherches d'effets.


Un seul vampire , donc, qui a soigneusement plié sa cape noire satinée pour s'habiller à la mode du pays, prenant les traits d'un tueur à gages tout de noir vêtu -bien sûr- et chevauchant un cheval couleur d'ébène . 

Le film se situe dans une petite ville où plusieurs jeunes filles sont atteintes d'une étrange maladie. L'histoire commence au chevet de l'une d'elles où l'on rencontre le Docteur Carter et le Pasteur Dan Young qui remarque deux étranges petites marques au cou de la malade. Quittant un moment la chambre de la jeune fille qui semble aller mieux, les deux hommes, accompagnés des parents rassurés, sont soudain attirés par un cri de terreur. Alors que le rideau de la fenêtre bouge encore, montrant la fuite d'un étrange visiteur, tous découvrent horrifiés le corps sans vie de la jeune fille.
Rentré chez lui, le Docteur Carter confie à ses enfants ses inquiétudes concernant un certain Buffer, propriétaire terrien avec lequel il est en conflit. Il est peu après retrouvé mort, deux petites marques à son cou. Ses enfants jurent de le venger, malgré les avertissements du Pasteur qui a compris qu'un esprit maléfique était à l'oeuvre. Peu après, un étrange cavalier noir arrive en ville et est engagé par Dolorès Carter afin de venger la mort du Docteur Carter, causée pense-t-elle par Buffer.

Ignorant toujours les mises en garde du Pasteur Young, amoureux d'elle, Dolorès accueille chez elle le mystérieux tueur à gages.

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Ce dernier est interprété par Michael Pade, acteur australien de second rôle, et figure bien connue à la fois du cinéma et des séries télés. Déjà rencontré en méchant dans mes deux précédentes critiques de films de type mystère gothique - Le château de la terreur et Le mystère du château noir -, il se spécialisera dans des rôles d'indiens notamment dans Hondo - film de John Farrow et série- ou dans Major Dundee de Sam Peckinpah. Il tournera une cinquantaine de films et apparaîtra dans autant de séries.
Il réussit, malgré son air inquiétant, à donner un côté presque sympathique à son personnage de vampire, dont on découvre l'origine de la malédiction et qui va tomber sincèrement amoureux de Dolorès.
Eric Fleming in Curse of the Undead (1959)
Dans le rôle du pasteur chasseur de vampires, on retrouve avec plaisir Eric Fleming, héros de la série western Rawhide, où il joue le rôle du chef de convoi Gil Favor. L'occasion est rare de retrouver cet acteur aux traits énergiques et à l'allure tranquille qui aura une carrière des plus brèves puisqu'il disparaîtra en 1966, lors du tournage d'un film au Pérou, noyé dans les rapides d'une rivière.
Rajoutons à la distribution Kathleen Crowley, dont la carrière se déroulera surtout à la télévision, dans de nombreuses séries, notamment western.

Dans les griffes du vampire est donc un bon film de série B, réalisé avec soin, sans gros effets mais avec une histoire intéressante et des personnages attachants, nous faisant passer très agréablement le temps, durant sa trop courte durée de 76 minutes.

Stan et Ollie : Une vie au service du rire

Affiche Stan & OllieStan & Ollie - Film de John S. Baird, 2019.
La rencontre de l'anglais Stan Laurel et de l'américain Oliver Hardy se fait à l'occasion du tournage du film Le veinard (The lucky dog) en 1921. Tous deux ont déjà une carrière derrière eux, Oliver Hardy dans toute une série de films muets où il tient des rôles secondaires et Stan Laurel à la fois comme acteur - il débute en même temps que Charlie Chaplin dont il sera l'ami et la doublure - puis comme réalisateur. C'est en faisant tourner Hardy que Laurel va donner naissance au duo, cinq ans plus tard, en passant de l'autre côté de la caméra.

Ils tourneront ensemble 106 comédies, passant sans souci le cap du parlant, grâce à un timbre reconnaissable qu'imiteront leurs doubleurs et à l'agréable voix chantée d'Oliver Hardy.
Durant leurs premiers films, ils se doubleront eux-mêmes en plusieurs langues, tournant ainsi quatre versions de leurs films - la post-synchronisation n'existait pas encore-.


Le comique du duo est essentiel gestuel, héritier du muet et du mime, basé sur une série de gags courts, physiques dus aux situations dans lesquelles les deux compères se trouvent, situations toujours sources d'ennuis. Leur humour est  bon enfant, jamais vulgaire ni porteur de message. Ils ne ridiculisent qu'eux-mêmes et finissent toujours par rire de leurs mésaventures.
Stan Laurel, véritable cerveau du groupe est un véritable bourreau de travail, écrivant sans cesse et donnant des directives aux différents réalisateurs. Oliver Hardy préfère l'improvisation et passe son temps hors caméra aux courses ou sur les terrains de golf.

L'amitié entre Laurel et Hardy sera longue et indéfectible, le duo à l'écran sera impossible à séparer.
Lorsque, suite à une dispute avec le producteur Roach, Stan est chassé du studio, la suite des comédies tournées par Oliver avec de nouveaux partenaires est un désastre. Le studio réunit alors les deux compères qui partiront peu après pour aller tourner ensemble pour les autres grands studios hollywoodiens. Hélas, les films qui leur sont proposés deviennent de piètre qualité et ils déplorent la perte de la relative indépendance qui leur était donnée aux studios Roach.


Le film de John Baird s'attache aux dernières années de carrière du duo, au début des années 50, lorsque ceux-ci partent en Angleterre dans ce qu'ils espèrent être une tournée triomphale afin de relancer leur carrière déclinante. Hélas, si la télévision qui diffuse en boucle leurs histoires leur assure une notoriété intacte, le public pense les deux acteurs vieillissants à la retraite.
Se débattant dans des problèmes financiers - ils ne touchent rien sur les rediffusions de leurs films, suite à la signature de contrats désastreux pour eux- , Stan et Ollie n'ont plus de films intéressants à tourner et n'ont même plus leur mot à dire sur les scénarios et les gags.

Venus à Londres tourner un obscur Robin des Bois ( qui ne sera jamais achevé) et jouer dans une pièce de faible envergure, les deux amis vont de désillusion en désillusion. Les salles sont à moitié vides ou de dimensions modestes bien que remplies d'un public qui leur est tout acquis.

Cette période de la vie du duo montre leurs difficultés et déceptions devant l'évolution du cinéma et de son public, tandis que les graves problèmes cardiaques d'Ollie vont bientôt l'obliger à abandonner la scène puis tout activité. Bien que le film n'en fasse pas mention, Stan sera également la même année victime d'un AVC, l'obligeant à son tour à arrêter sa carrière.

Un film très nostalgique, montrant l'indéfectible amitié entre les deux acteurs, avec notamment une très belle et courte scène où Stan, contraint à jouer sur scène avec un remplaçant d'Ollie - suite à la crise cardiaque de celui-ci-, attend angoissé l'instant de son entrée en scène. Jetant un coup d'oeil à la scène et apercevant son nouveau partenaire, il s'arrête et on vient annoncer que la représentation est annulée..impossible pour Laurel de continuer sans Hardy.

L'anglais Steve Coogan et l'américain John C. Reilly se glissent dans la peau des deux acteurs qu'ils interprètent de façon prodigieuse, reprenant à merveille leur façon d'évoluer, de parler et de jouer tandis qu'un maquillage parfait vient compléter l'illusion.

Au fil du film, peu de numéros comiques sont montrés et on assiste plusieurs fois au même morceau de scène de la pièce qu'ils interprètent. On aurait sans doute aimé retrouver un peu plus les meilleurs moments des deux comiques mais le film est résolument tourné vers la nostalgie. Il ne sera donc certainement pas de nature à faire découvrir Laurel et Hardy aux jeunes générations mais il s'adresse à celles qui ont vu leurs aventures rediffusées tant de fois à la télévision ou bien qui ont suivi leurs personnages de dessin animé - 1ère diffusion en 1966-.

Le film se suit donc avec un brin de nostalgie voire de tristesse bien qu'il ne joue pas trop sur l'aspect larmoyant et se termine par une petite danse de nos deux amis en guise d'adieu.


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Survivant de huit ans à son compère, Laurel ne finira cependant pas oublié et miséreux comme cela l'a souvent été dit. Bien que malade, il continue, jusqu'en 1965, à vivre avec sa femme dans un hôtel de Santa Monica où il reçoit la visite de plusieurs célébrités de l'époque (Alec Guiness, Dick Van Dycke, Jerry Lewis... ) et d'étudiants en cinéma. Gardant une fidélité totale à son ami disparu, il continuera jusqu'à sa mort à écrire scénarios et gags pour leur duo et à répondre aux nombreuses lettres qui continuent à lui parvenir du monde entier. 
Ultime joie pour le vieil acteur, il recevra en 1961 un oscar d'honneur pour l'ensemble de sa carrière.

Le château de la terreur : Boris Karloff, la vie d'un gentil monstre

Affiche Le Château de la terreurLe château de la terreur (The strange door) - Film de Joseph Pevney, 1951.

Souvent évoqué pour ses rôles de monstres, notamment pour celui de la Créature de Frankenstein en 1931, Boris Karloff a traversé six décennies de l'histoire du cinéma, depuis 1919 jusqu'en 1969 - année de son décès-. L'acteur est né d'un père anglo-indien et d'une mère aux ascendances indiennes. Il est le petit-neveu d'Anna Léonowens, connue pour ses récits sur son séjour comme institutrice à la cour du Roi de Siam - Films et célèbre comédie musicale immortaliseront son histoire : Anna et le Roi -.

Les origines indiennes de Boris - William de son vrai prénom ! - le prédestineront aux débuts de sa carrière à jouer des rôles d'indiens d'Amérique ou d'arabes dans divers films muets, tout en réalisant des travaux manuels sur les plateaux de tournage pour arrondir son salaire.


Résultat de recherche d'images pour "boris karloff frankenstein"Enchaînant les films - plus d'une soixantaine - jusqu'au début des années 30, il trouve finalement la consécration en incarnant le monstre de Frankenstein, haute silhouette couturée à la démarche saccadée et à l'intelligence plus que limitée. Enchaînant un an plus tard avec le rôle titre de La Momie, son statut de "créature" est assuré.


Doté d'un visage taillé à coups de serpe, d'un regard facilement halluciné et d'un sourire inquiétant, Boris jouera à merveille toute une galerie de personnages peu communs, avec une prédilection pour les savants fous.
Au début des années 50, Boris Karloff tourne deux excellents films de style mystère gothique pour les studios Continental, préfigurant l'âge d'or des films d'horreur anglais de la Hammer - que l'on date généralement de 1955 avec le film Le monstre, réalisé par Val Guest -.
Le Château de la terreur, en 1951 et Le mystère du château noir, réalisé en 1952, pourraient par leur atmosphère, leur titre et par certains éléments de leur histoire, être qualifiés de films d'horreur bien que celle-ci soit limitée et que le surnaturel soit totalement absent. Ils sont de plus américains, ce qui nous éloigne encore plus des studios Hammer.



Après avoir évoqué le premier de ces films - voir ma critique sur le sujet - , intéressons-nous à présent au Château de la terreur (The strange door), adapté du roman de Robert Louis Stevenson, La Porte du Sire de Malétroit (écrit en 1878).



Résultat de recherche d'images pour "the strange door"L'histoire se passe en France, au XVIIIème siècle. Un jeune noble débauché, Denis de Beaulieu, est attiré et séquestré dans un sombre château par un déplaisant Seigneur, Alain de Malétroit, qui veut le forcer à épouser sa nièce.

S'attendant à rencontrer une "harpie édentée", Denis est surpris de se retrouver face à une ravissante jeune fille, Blanche, réticente elle aussi à ce mariage forcée.
Le spectateur ne tarde pas à découvrir les desseins de Malétroit, incarné par un inquiétant, vicieux et obséquieux Charles Laughton. Celui-ci est secondé par un non moins inquiétant, Boris karloff, dans le rôle de son serviteur Voltan. Celui-ci est chargé de veiller sur un vieux prisonnier, Edmond, emprisonné depuis 20 ans dans les geôles du château et qui n'est autre que le frère du maître des lieux.
Résultat de recherche d'images pour "the strange door"Heureusement, Voltan se révèle être du côté des gentils. Entièrement dévoué à son maître emprisonné et à la fille de celui-ci, Blanche, il est d'abord prêt à trucider Denis, pour empêcher le mariage forcé.
Mais, loin d'être le débauché d'abord décrit, ce dernier est un jeune homme sympathique et courageux, prêt à aider Blanche et le mystérieux prisonnier. Et comme les deux jeunes gens vont rapidement tomber amoureux l'un de l'autre, l'idée du mariage ne semble soudain pas si effroyable, à la grande déception du maléfique Maletroit. Voltan va devenir "l'ange gardien" du jeune couple.



Le film frappe par la beauté de son noir et blanc, par ses costumes et par une indéniable qualité artistique de sa mise en scène; on notera notamment l'atmosphère brumeuse et inquiétante des lieux.
Résultat de recherche d'images pour "the strange door"Moins beau visuellement, car se passant plus à l'intérieur, que Le mystère du château noir, le film bénéficie là aussi de la belle photographie d'Irving Glassberg, qui magnifie littéralement le noir et blanc.
L'histoire nous entraîne dans des sombres cachots, agrémentés de savants mécanismes guidés par la roue d'un moulin à eau, qui va notamment chercher à écraser nos héros.

Bien que l'atmosphère soit typiquement anglaise, l'histoire, ne l'oublions pas, se déroule en France comme nous le rappelle l'intendant du château qui recommande, pour le repas de mariage, de prévoir "surtout, beaucoup d'escargots" (beurk) avec un humour pas forcément volontaire.


Un an plus tard, dans Le mystère du château noir, Boris Karloff reprendra un rôle assez semblable, passant cependant de serviteur à docteur - un type de rôle qu'il interprétera souvent, sauf qu'il se trouve une nouvelle fois, du côté des gentils, ce qui n'est pas forcément évident durant la première partie du film-.
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La filmographie de Boris Karloff est riche d'environ 170 films, auxquels il faut rajouter plusieurs séries comme l'excellente série fantastique Thriller ou la série policière Colonel March.
Sa carrière au théâtre sera également fameuse et il s'illustrera notamment dans son rôle favori pendant trois ans dans la distribution originale d'Arsenic et vieilles dentelles.
Rajoutons enfin à l'évocation de son immense carrière, des émissions radio, notamment une émission enfantine et l'enregistrement de livres pour enfants. Il se dévouera pour la cause des enfants handicapés pendant près de 30 ans.
Il meurt d'une pneumonie en 1969, laissant son nom à un astéroide.



Le château de la terreur est l'occasion de redécouvrir cet acteur - que l'on a tort de réduire trop souvent à la Créature de Frankenstein ou à La Momie - dans un rôle fort différent.



Le film est prenant de bout en bout; d'une durée assez courte, on excusera la fin un peu abrupte et le peu de développement de l'histoire et on appréciera la beauté visuelle, l'atmosphère de mystère et la présence de très bons acteurs.



Hugo Cabret : "Quel est donc l'homme à notre époque qui pourrait vivre sans féerie, sans un peu de rêve ?"

  Hugo Cabret - Film de Martin Scorsese, 2011. On sait le Réalisateur Martin Scorsese amoureux du cinéma, par sa carrière bien sûr mais égal...