Ben Hur : Ben Hur et mon vieux cinéma de quartier

Affiche Ben-Hur
Ben Hur -  Film de William Wyler, 1959


Il est, bien entendu difficile d’écrire sur son film préféré sans tomber dans le commun « magnifique, grandiose, parfait…. ». Bien sûr, Ben-Hur est tout cela mais je pense intéressant de vous expliquer tout d’abord mon rapport à Ben-Hur.

Ce film m’accompagne depuis mon enfance, vu et revu un nombre incalculable de fois au cinéma, en VHS, en DVD. Je l’ai découvert, petite fille, à la fin des années 70, grâce à un cinéma de Montpellier : Le Petit Odéon.
Typique des petits cinémas dits de quartier, à la fois ciné-club et dancing, Le Petit Odéon projetait des films classiques les samedis et dimanches après-midi. Parmi les grands classiques régulièrement proposés, 3 monuments : Ben-Hur, Autant en emporte le vent et Docteur Jivago.
J’ai ainsi vu et revu régulièrement ces films ( Ben- Hur étant bien entendu mon préféré) jusqu’à la fin des années 80.


Les projections s’émaillaient de tous les incidents classiques des salles de cinéma « artisanales ». Ainsi, pour Ben-Hur, deux anecdotes me sont restées en mémoire ; un jour, la bobine étant mal positionnée, toutes les têtes des personnages étaient coupées. Un autre jour, la naissance de Jésus ayant été oubliée, le film commença aux retrouvailles entre Ben Hur et Messala.
Lorsque ces incidents se produisaient, le problème était généralement signalé au bout d’environ 10 minutes-1/4 d’heure de film (selon le souci). La projection s’interrompait ; on se rassemblait dans le hall, bavardant, riant et râlant un peu.
Au bout d’un moment plus ou moins long, on nous annonçait que le film reprenait depuis le début et c’était parti …..
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Venons-en enfin à cette fabuleuse histoire bâtie autour d’un personnage auquel le public va s’attacher immédiatement, Judas Ben-Hur, un jeune prince juif, injustement accusé de tentative de meurte, qui voit sa vie et sa famille anéanties, par la jalousie de son ami d’enfance. Au milieu des épreuves et de son désir de vengeance, il croisera le chemin du Christ et de son message d’amour et de pardon.
Les amoureux d’action retiennent généralement de ce film les deux moments forts que constituent la course de chars, magnifiquement filmée et l’impressionnante bataille navale.




Mais Ben-Hur, c’est d’abord l’histoire du Christ, présenté de superbe manière, sans que l’on voit jamais son visage, lui donnant une présence très forte, comme dans cette scène superbe où il secourt Judas en route pour les galères. Une main apaisante caresse les cheveux de l’homme épuisé, lui donne à boire et le relève. Ben-Hur repart vers son sinistre destin, ayant retrouvé son courage.


Claude Heater, chanteur d’opéra de 32 ans (à peu près l’âge de Jésus à sa mort) interprète le rôle.
Et puis Ben-Hur, c’est avant tout Charlton Heston, qui n’a jamais été aussi beau : presque nu sur le radeau de fortune après le naufrage de la galère, haute silhouette en toge romaine, en Prince recevant Esther et son Père….
Les autres interprètes restent également en mémoire : Stephen Boyd en cynique Messala, Jack Hawkins en Père adoptif, Finlay Currie en roi mage plus vrai que nature, le succulent Hugh Griffith en Cheik et la belle Haya Harareet, l’émouvante Esther (un peu en deça dans son interprétation)
On retiendra aussi des images magnifiques, parfois fugitives, comme celle du christ en Croix qui se reflète dans une flaque d'eau ou encore l'image de la main de Jésus mort auquel répond celle de la main des femmes miraculées.
Le cinéma a atteint des sommets avec ce film magistral.

Enid Blyton : La vie pas si rose d'un écrivain de la Bibliothèque rose

Le roman d'Enid Blyton - Téléfilm de James Hawes, 2009

Affiche Le Roman d'Enid BlytonOui-oui, Jojo Lapin et Le club des cinq font partie des souvenirs de la petite enfance de beaucoup d’entre nous. A travers films, séries animées et jeux vidéos, Oui-oui séduit encore les jeunes générations.
Derrière ces personnages, j’ai toujours imaginé leur créatrice, Enid Blyton comme une charmante vieille dame, un peu dans le style d’Agatha Christie comme les photos la montrent sur ses dernières années. La bonne grand-mère s’apparenterait plutôt à une Tatie Danièle…et oui. Et voilà comment, en une neigeuse journée de février 2018, mon beau rêve partit en éclats.

La vie de famille chez Enid Blyton n’est guère joyeuse. L’écrivain délaisse mari et enfants, confiant celles-ci à une nurse dès leur naissance ; elles auront le privilège de rester avec leur Mère 1 heure par jour, de 16 h à 17h, si celle-ci est à la maison.
Lorsque son mari part à la guerre, elle divorce en lui demandant de prendre les torts à sa charge, en échange de la promesse de pouvoir voir ses filles comme il le souhaite.
Elle téléphone également à son éditeur pour lui demander de licencier son mari à son retour de la guerre et refuse de laisser ses enfants parler au téléphone avec leur Père.
Elle demande même à celles-ci d’appeler leur beau-père Papa et d’oublier qu’elles en ont eu un autre. Devant le désespoir des petites filles qui continuent à réclamer de voir leur Père, Enid les envoie l’une après l’autre en pension…et hop, bon débarras.

Centré sur la description de la personnalité d’Enid Blyton et sur sa vie privée, le film offre un portrait sans concession de l’écrivain, dont la vie est entièrement dévouée à l’écriture au détriment de sa vie familiale, on l’a bien compris.
Enid écrira entre 500 et 800 ouvrages – le chiffre étant très fluctuant selon les sources et comptant à égalité romans, nouvelles et articles-. Sa frénésie d’écriture fera naître la rumeur selon laquelle elle aurait fait écrire par d’autres certains de ses romans. Accusée d’avoir un style d’écriture simpliste et de véhiculer des idées sexistes et même racistes via certains de ses romans – notamment Oui-oui !! Et oui ! -, elle fut même interdite de certaines bibliothèques anglaises - et on se demande où se situent l’intolérance et les préjugés !!

Face à ses détracteurs, Enid répond que les seules critiques dignes d’intérêt pour elle sont ses jeunes lecteurs. Il suffit de voir le regard ébloui de ceux-ci lorsqu’Enid vient faire la lecture d’un de ses livres dans une bibliothèque pour se dire que finalement seule l’opinion des jeunes lecteurs compte.
On pourra regretter que le film n’aborde que de façon succinte la carrière de l’écrivain, ses succès et ses difficultés. On aurait aussi aimé voir la genèse de ses personnages et ses sources d’inspiration. Seul Oui-oui a une présence réelle – si on peut dire-.
Dans une scène de la fin du film, Enid place une figurine de Oui-oui sur un meuble devant la photo de ses filles, qu’elle pousse en arrière pour lui faire de la place. Le geste résume tout le film.

Helena Bonhman Carter livre une composition forte de ce personnage, femme de caractère mais au final assaillie de doutes. On en ressort un peu effaré, mais aussi très nostalgique.

Le prisonnier de Zenda : Romance Ruritanienne

Affiche Le Prisonnier de Zenda
Le prisonnier de Zenda, Film de Richard Thorpe, 1952

La Ruritanie est un joli pays d’opérette, situé quelque part dans l’Empire Austro-hongrois ; les forêts y sont superbes et giboyeuses, les habitants rustiques et heureux, les maisons colorées et le souverain habite dans un beau château.
Le roman d’Anthony Hope, Le Prisonnier de Zenda, a donné naissance au terme de " Romance ruritanienne " pour désigner des romans d’aventures se situant dans des petites monarchies d’Europe centrale.
On pense notamment à Tintin et le sceptre d’Ottokar, à Koenigsmark de Pierre Benoit, à La soupe aux canards de Léo MacCarrey – avec les délirants Marx Brothers – à Chitty Chitty Bang Bang de Ian Fleming ou encore à La grande Duchesse de Gérolstein d’Offenbach.
Le genre a inspiré à la fois le roman, le cinéma, la bande dessinée et l’art lyrique.

Si les monarques ruritaniens ont tout pour être heureux – ils sont riches, possèdent un beau pays où il fait bon vivre et un splendide château -, tout n’est cependant pas rose pour eux.


L’état voisin menace généralement d’envahir le pays et de déclencher la guerre (Sylvania envahit Freedania dans La soupe aux canards, La Bordurie veut annexer La Syldavie dans Le sceptre d’Ottokar). Autour de lui, traîtres et comploteurs ourdissent de sombres machinations pour le renverser ou pour l’assassiner.

C’est par les yeux de l’étranger – Tintin dans Le sceptre d’Ottokar, Raoul, le jeune précepteur de Koenigsmark ou encore l’anglais Rodolphe dans Le prisonnier de Zenda – que le lecteur-spectateur découvre le royaume. L’étranger y vivra de nombreuses aventures et aidera à déjouer les complots.
Tous ces aspects permettent de poser le contexte du Prisonnier de Zenda, devenu grâce à Richard Thorpe un beau film et un des meilleurs films d’aventures produits par la MGM.
La distribution est éblouissante, Deborah Kerr et Stewart Granger composant un des plus beaux couples du genre et James Mason – encore et toujours opposé à son compatriote – un méchant savoureux au point d’en devenir presque sympathique.
Pour rappel de l’histoire : Rodolphe Rassendyl, un anglais en vacances dans le royaume de Ruritanie rencontre dans la forêt son sosie parfait, son cousin éloigné et futur souverain du lieu, peu motivé par son couronnement qui doit avoir lieu le lendemain.
Dans un pavillon de chasse, le Colonel Zapt, aide de camp du Roi découvre celui-ci, plongé dans un profond sommeil dû à un vin drogué, bu lors d’une soirée bien arrosée en compagnie de son cousin.
Le prince Michel, frère de Rudolf, désireux d’accéder au trône, est à l’origine du complot.
Rodolphe devra alors prendre la place du Roi pour le couronnement qui doit avoir lieu quelques heures plus tard. Lors de la grandiose cérémonie, il prête serment, se voit couronner par l’Evèque du lieu et voit à ses pieds sa future épouse, la Princesse Flavia.
Pendant ce temps, le véritable Roi, resté inconscient dans le pavillon de chasse est enlevé et enfermé au Château de Zenda, propriété de Michel.
En attendant de délivrer le prisonnier, Rodolphe doit continuer à jouer son rôle de Roi, déchiré entre son amour pour Flavia – amour né entre eux au premier regard – et son devoir.

Le film est la troisième adaptation du roman d’Anthony Hope.
Détail surprenant, le film est le remake shot-for-shot de la version, déjà excellente de 1937 avec Ronald Colman – critique à venir-. On y retrouve à l’identique scènes, dialogues, musiques et plans.

La version de 1937 bénéficiait du talent de Ronald Colman, moins athlétique que Stewart Granger mais très attachant et sensible et de l’athlétique Douglas Fairbanks Jr, dans le rôle de Rupert. Manquaient cependant les riches couleurs de la version de 1952 et une Flavia plus sensible que Madeline Carroll.
Le roman a connu une suite, Rupert de Hentzau, traduite par le titre Au service de la Reine, qui met à l’honneur le méchant de l’histoire et voit le retour de Rodolphe, de nouveau en Ruritanie pour aider sa chère Reine Flavia.
Richard Thorpe eut un moment le projet d’adapter cette suite mais hélas le film ne vit jamais le jour. Il en existe cependant deux adaptation du temps du muet, en 1915 puis 1923 puis deux téléfilms anglais.
Moi, je rêve à ce qu’aurait donné une suite avec le même trio d’acteurs Stewart Granger, Deborah Kerr et James Mason…

L'esclave reine : Les mises en scène colossales du temps du muet

L'esclave reine - Film de Michael Curtiz, 1924

Affiche L'Esclave reine
Moon of Israel (L’esclave reine en français) est une adaptation du roman d’Henry Ridder Haggart, auteur surtout connu pour Les mines du roi Salomon et les divers ouvrages qui suivront, consacrés à son héros Allan Quatermain. L’histoire de l’Esclave reine s’inspire en partie du chapitre de l’Exode de la Bible.

Le prince Seti, fils héritier du Pharaon Menapta est un jeune homme au cœur généreux, aimant avant tout les études et peu avide de pouvoir, tout l’opposé de son cousin Amenmeses qui convoite le trône.
Accompagné de son ami, le poète Ana, Seti aime parcourir le royaume afin de découvrir la vie du peuple. Sur un chantier, il découvre les rudes conditions de vie des esclaves hébreux, soumis au fouet de cruels contremaîtres. En voulant prendre la défense d’un de ces esclaves, Seti découvre une ravissante jeune fille, Merapi, qui lui promet une reconnaissance éternelle pour sa bonté.
Lorsque, quelques temps après, le Prince désireux de revoir Merapi assiste à une cérémonie au temple, il tire, par accident, le tissu recouvrant l’autel. Pour ce sacrilège, il manque d’être lapidé puis assassiné par la suite et ne doit son salut qu’à Merapi, qui est tombée amoureuse de lui.
Et Moïse, me direz-vous, que fait-il donc dans cette histoire ?
On l’aperçoit brièvement parmi le peuple d’esclaves. Il faudra ensuite patienter un peu pour le voir lancer contre Pharaon les 7 plaies d’Egypte avant d’entraîner son peuple vers la liberté et la Terre promise. Nous n’assistons pas ici à une version des 10 commandements, les héros de l’histoire étant Merapi et son bien-aimé Seti.
Le film réserve cependant un épisode consacré au passage de la Mer Rouge et à la poursuite des Hébreux par les chars égyptiens.

Les moyens consacrés à cet épisode ainsi qu’au couronnement du Pharaon Amenmeses – Seti ayant été déchu de son titre de prince héritier pour avoir défendu les hébreux et réclamé leur libération suite à l’appel de Moïse – sont colossaux.
Le grandiose film de Michael Curtiz met en scène plus de 5 000 figurants, battant la foule des 2 500 figurants du film Les dix commandements de Cecil B. De Mille (qui pour ne pas être en reste en déplacera 20 000 lors du remake réalisé en 1956).
Le film offre plusieurs moments grandioses, notamment la poursuite dans le désert où le nombre de chars mis en scène est faramineux comme est impressionnante la foule qui traverse la Mer Rouge. La pauvreté des moyens techniques et effets spéciaux conduira à traiter le miracle du partage des eaux de façon assez simpliste, par des effets de surimpression d’images, par la submersion d’un grand trou où 100 m3 d’eau ont été déversés et par la construction de murs en plâtre.
Après 2-3 cartons explicatifs, la fin de la scène est quand même assez vite escamotée, ce qui est dommage vus les moyens mis en oeuvre. On pardonnera cela en voyant le soin mis dans les décors, costumes et mouvements de foule.
Le désert du Sinaï se situe en fait près de Vienne, dans le Laaer Berg, zone comprenant à l’époque des gisements de glaise. Le paysage permet ainsi de figurer le désert de façon convaincante.

Si on pense généralement à Cecil B de Mille pour les colossales mises en scène des péplums du temps du muet, Michael Curtiz est bien son égal comme il le prouve dans ce film, comme précédemment dans Sodome et Gomorrhe, tourné en 1922, puis dans L’arche de Noé – le plus colossal des péplums tournés du temps du muet-.
De fait, impressionné par L’esclave reine, Jack Warner invitera Michael Curtiz à venir travailler aux studios Warner à Hollywood.
Le réalisateur qui n’en était pourtant pas à ses débuts – il avait déjà réalisé près de 40 films – avait encore à nous offrir bien d’autres chefs d’œuvre. Citons notamment capitaine Blood, Les aventures de Robin des bois ou encore Casablanca.
Il nous offre ici déjà une magnifique réalisation. D’une durée d’1h45, le film se suit avec intérêt grâce à un rythme parfait, au charme de ses héros et au talent d’acteur du chilien Adelqui Migliar, très attachant et émouvant dans le rôle de Seti, notamment dans la belle scène finale.

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